L'effet magique de cette danse sur les jeunes peut s'expliquer simplement de la façon suivante: si, à travers ses changements d'appellations, elle a subi avec succès l'épreuve du temps, c'est qu'elle avait un support musical d'un grand retentissement : la musique Jazz.
Ce qu'on peut affirmer, c'est qu'elle fut en gestation aux U.S.A. dans les années 1920 - une bonne décennie avant son arrivée en Europe -- et que son origine incontestée est noire. La caractéristique fondamentale du Jazz est dans l'accent qui est placé non pas sur les temps``1`` et ``3``, mais sur les temps ``2`` et ``4`` : ``after beat ``comme disent les Jazzmen, un style qui vient primitivement des rythmes africains. Ce que l'on peut traduire différemment par rythmes syncopés.
Dans des temps éloignés existaient exclusivement chez les Noirs Américains des musiques désignées sous le nom de ``Blues`` ( souvent vocales ) ou ``Rythm and Blues `` ou encore "Boogie Woogie".
Ces musiques, d'avant-garde pour leur époque, connurent un succès extraordinaire et immédiat dans toute l'Amérique et futrent distribuées sous l'étiquette de `` Race Records``, ce qui signifie `` Musique pour les Noirs``. Mais, en fait, leur succès fut général et déborda largement sur toute la population américaine, apportant la notoriété, sinon la richesse à ses musiciens novateurs. À titre d'exemple, il faut savoir que Louis Amstrong était déjà célèbre en 1933.
Ce n'était pas à proprement parler une musique spécifique, mais une façon d'interpréter le jazz des premiers temps, un style en quelque sorte. Cette musique était vraiment faite pour la danse plutôt que pour toute autre chose.
Les rétrospectives du Rock mettent souvent en avant la structure originelle du ``Blues `` dont le chorus comprenait presque toujours douze mesures, alors que beaucoup de partitions de Jazz et de variétés sont écrites sur la base de 32 mesures.
Cela change-t-il quelque chose au Rock'n' Roll en tant que musique ? Non, puisqu'il s'agit avant tout de l'interprétation qu'en donnent les orchestres.
Pour nous, danseurs, considérons le problème sous l'angle de la musique de danse.
Deux styles émergent et s'imposent : d'une part, le Boogie Woogie traditionnel et caractérisé par la séquence ``croche pointée, double croche`` dont le chorus comprend les 12 mesures du ``Blues ``.
D'autre part, le Rock'n' Roll .
Le Boogie et le Rock ont une caractéristique commune : contre - temps ``After Beat``, très accentué par la batterie sur des chorus de 12, 16 ou 32 mesures.
Quand un pas de Boogie se danse sur huit battements, un pas de Rock se danse sur six battements (bien qu'il existe aussi un Boogie 6 ). Quelle que soit la structure des partitions du Rock -12, 16, ou 32 mesures - cela ne change rien pour nous puisqu'il faut toujours une mesure et demie pour faire un`` pas``. Notons que la musique ``Boogie`` permet de danser le Rock.
C'est Louis Jordan qui popularisa le vocable ``Rock ``N`` Roll ``dans les années 40.
Il est utile et intéressant de connaître les noms de musiciens - tous Noirs - qui ``démarrèrent `` et illustrèrent le Rock.
Ils s'appelaient Lionel Hampton, Earl Bostic, Louis Jordan ( pour les Jazzmen), Chuck Berry, Fats Domino. Mais cette expression ne se répandit parmi les grands publics qu'en 1955, grâce à Bill Haley et Elvis Presley, entre autres.
Cependant, ce n'était plus le vrai Rock'n' Roll des Noirs, mais seulement des copies commerciales avec les caractéristiques propres aux Blancs.
L'engouement ne s'est pas ralenti avec le temps. L'appellation Rock ``N`` Roll fait toujours recette et parmi l'avalanche de partitions aux étiquettes magiques, tout n'est malheureusement pas consommable. Plus la production augmente, plus la sélection s'impose. IL en va de l'épanouissement de notre danse.
Que demandent les jeunes qui franchissent la porte d'une École de Danse? Du Rock et encore du Rock.
Sur le plan professionnel, on ne peut parler du Rock sans aborder le Jive.
Dans le public québécois, qui connaît le Jive? Uniquement les compétiteurs de danse. Car c'est sur ce nom de Jive qu'un certain Rock est dansé en compétition, la cinquième et dernière des danses latines.
Les Anglais qui dirigent, orientent et contrôlent la danse mondiale ont garder cette appellation. Mais ils prennent enfin conscience que le Jive n'est pas le Rock.
L'origine du Jive remonte à la dernière guerre mondiale, quand les boys américains mirent leurs pas sur le sol de la Vieille Angleterre. Sous les yeux étonnés et intéressés des professionnels anglais, ils donnèrent une interprétation de la musique jazz qu'ils dénommèrent Jive. Les Anglais en firent ce que nous voyons aujourd'hui : une danse où la base 6 temps subsiste, revue et corrigée, avec beaucoup de fioritures.
Il existe trois rythmes :
Quel belle histoire que celle de cette appellation de Boogie Woogie. Car ce mot fait penser infailliblement au terme de ``Boogie``, essieu de wagon avec deux roues à ses extrémités. Y aurait-il un rapport entre les deux ? En fait, c'est bien de cela qu'il s'agit. Les Noirs, récemment affranchis et libres de leurs mouvements, étaient trop pauvres pour acquitter le prix des billets de chemin de fer et voyageaient en fraude, cachés sous le plancher des wagons, accrochés aux Bogies. La ``musique`` des roues sur les rails scandait toujours le même bruit, le même ``refrain ``. La transposition musicale se fit par le truchement de leur imagination : le Boogie Woogie était né.